La consultation des parties prenantes s’est déroulée à merveille dans la sous-préfecture de Linko du mardi 21 février au samedi 4 mars 2023.
Mardi 21 février à la Préfecture de Kérouané, puis avec les autorités sous-préfectorales à Linko:
Les 12 personnes de l’équipe des trois partenaires, arboRise, GUIDRE et South Pole, s’est ensuite rendue dans les villages de Linko, Forono, Booko, Diaradouni, Kissidou et Boidou. La consultation s’est chaque fois déroulée selon le même agenda:
L’accueil des autorités du village, la bénédiction de la réunion et la documentation de la liste des participant.e.s
La présentation du projet, à l’aide de deux Posters, par Philippe Nicod (directeur d’arboRise) avec la traduction en langue locale par Saidou Marega (directeur exécutif de GUIDRE). De petits exemplaires des posters étaient placés à proximité immédiate des participant.e.s pour faciliter la lecture
Les questions de compréhension de l’assistance ainsi que les réactions spontanées
Les discussions approfondies, en langue locale, sur les impacts et risques du projet dans plusieurs groupes-focus. Les groupes-focus des femmes étaient facilités par deux employées de GUIDRE.
Les formulaires d’appréciation du projet et les explications de ce qu’il sera fait des enseignements de la consultation des parties prenantes
Comme on le voit sur ces images, la participation était très forte et très équilibrée en termes de genre, de classe d’âge et de degré d’engagement dans le projet. De nombreuses familles ont manifesté leur désir de rejoindre le projet et les manifestations de reconnaissance ont été nombreuses et touchantes.
Après avoir pu observer six consultations, les deux groupes de superviseur.euse.s se sont répartis les consultations dans les 20 villages restants, pendant que la direction du projet allait poursuivre les consultations à Conakry.
Pour arboRise il est essentiel de comprendre l’impact local de nos activités de reboisement. C’est pour cela que nous menons régulièrement des enquêtes sur le terrain (exemple 1, exemple 2, exemple 3). Le processus de certification carbone du Gold Standard partageant cette même préoccupation, nous avons organisé une très large consultation des parties prenantes en février 2023. Cette consultation vise à
Informer sur les détails du projet et recevoir les commentaires de toute personne potentiellement touchée par le projet
Échanger des points de vue et des préoccupations de manière libre et transparente
Dialoguer autour des bénéfices, des impacts et des risques du projet
Établir un mécanisme de communication continue et de résolution de conflits
Créer les bases pour une collaboration étroite et durable
ArboRise et ses partenaires South Pole et GUIDRE ont identifié en amont les parties prenantes suivantes:
Les 250 familles-graines et les 250 familles-terrains des 26 villages participant au premier cycle de reforestation
Les autorités ainsi que toute la population des 26 villages, et les membres du Comité de Gestion Communautaire créé dans chaque village
Les autorités Préfectorales (Préfet, Secrétaire Général, Directeur préfectoral de l’environnement, chef de section des Eaux et Forêts, chef d’antenne d’OGUIB)
Les autorités sous-préfectorales (Sous-Préfet, Maire de la Commune Rurale de Linko, Vices-Maires, Secrétaire Général, Président de District, Imam de Linko, Sotikomo de Linko, Chef du Cantonnement Forestier de Linko)
Les autorités nationales du Ministère de l’Environnement et du Développement Durable (Ministre, Conseiller en charge du développement durable, Autorité Nationale Désignée Guinée – Fond Vert pour le Climat, Directeur National des Eaux et Forêts (DNEF), Responsable Aménagement du territoire, DNEF)
Pour permettre à toutes les personnes intéressées de participer, plus de 700 lettres d’invitation personnalisées ont été envoyées 30 jours avant le début de la consultation, avec le soutien logistique essentiel de notre partenaire GUIDRE. Pour inclure également les personnes illettrées, l’invitation a été diffusée sur la radio locale de Kérouané pendant cinq jours matin et soir.
Pour que chaque invité.e. puisse se préparer, l’invitation contenait
la description du projet
les Objectifs de Développement Durable visés par le projet
ODD 4: Education de qualité
ODD 8: Travail décent
ODD 13: Action climatique
ODD 15: Vie sur terre (biodiversité)
tous les risques potentiels du projet selon les principes du Gold Standard, ainsi que les mesures prévues pour limiter chaque risque spécifique:
Principe 1. Les droits de l’homme
Principe 2. L’égalité entre les hommes et les femmes
Principe 3. Santé, sécurité et conditions de travail de la communauté
Principe 4.1 Sites du patrimoine culturel et historique
Principe 4.2 Expulsion et déplacement forcés
Principe 4.3 Régime foncier et autres droits
Principe 4.4 Populations autochtones
Principe 5. Corruption
Principe 6.1 Droits du travail
Principe 6.2 Conséquences économiques négatives
Principe 7.1 Émissions
Principe 7.2 Approvisionnement en énergie
Principe 8.1 Impact sur les schémas/écoulements naturels de l’eau
Principe 8.2 Érosion et/ou instabilité des masses d’eau
Principe 9.1 Modification du paysage et du sol
Principe 9.10 Zones à haute valeur de conservation et habitats critiques
Principe 9.11 Espèces menacées d’extinction
Principe 9.2 Vulnérabilité aux catastrophes naturelles
Principe 9.3 Ressources génétiques
Principe 9.4 Rejets de polluants
Principe 9.5 Déchets dangereux et non dangereux
Principe 9.6 Pesticides et engrais
Principe 9.7 Exploitation des forêts
Principe 9.8 Alimentation
Principe 9.9 Élevage
La bonne réception des invitations a été confirmée par des pointages:
ArboRise est fière d’annoncer la conclusion d’un partenariat stratégique avec South Pole, leader mondial dans l’accompagnement de projets et de stratégies de réduction des émissions carbone. South Pole développe et finance des projets climatiques dans le monde entier (plus de 700 projets à ce jour), afin de réduire les émissions de carbone, protéger la biodiversité et favoriser l’adaptation des communautés locales les plus fragiles au changement climatique.
Dans le cadre de l’Emission Reduction Partnership Agreement signé avec South Pole, arboRise bénéficiera
des compétences techniques de South Pole pour obtenir la certification carbone de notre approche
des ressources de South Pole pour commercialiser les crédits carbone générés par nos campagnes de reforestation
d’un préfinancement sous forme de prêt pour couvrir les coûts de la phase de plantation
Pour rappel, arboRise et les familles-terrains s’engagent mutuellement sur une durée de 20 ans. Seuls les revenus des crédits carbone permettront de garantir une rémunération juste pour ces familles qui engagent leurs terrains dans notre projet.
Et seule une certification carbone permettra de garantir à nos bailleurs:
que les reboisements ont véritablement été mis en œuvre (réel)
que les reboisements n’auraient pas eu lieu sans le projet (additionnel)
qu’une croissance réelle de la biomasse peut être mesurée par rapport à une «baseline» (mesure initiale) en tenant compte des incertitudes et des risques de «leakage» (p.ex. si le projet induit des déforestations à d’autres endroits) (mesurable)
qu’un auditeur externe d’une organisation accréditée à audité le projet (vérifiable)
que le carbone séquestré sera conservé 100 ans (permanent)
Que le carbone séquestré n’est comptabilisé qu’une seule fois (unique)
L’accord avec South Pole est une étape essentielle pour pérenniser le projet et garantir sa viabilité économique à long terme.
Une étape majeure de l’aventure arboRise a été franchie hier soir 12 décembre lors de l’assemblée générale extraordinaire de notre association. Conformément à la proposition du comité, l’assemblée générale a voté à l’unanimité la dissolution de l’association et sa transformation en fondation arboRise.
Pourquoi?
La reforestation est une activité qui prend, naturellement, du temps. En conséquence arboRise s’engage dans des partenariats de très longue durée:
en particulier avec les familles-terrains, les conventions s’étendent sur une durée de 20 ans. Suite à nos enquêtes sur place, nous sommes convaincus que seuls les revenus des crédits carbone permettront de garantir une rémunération juste pour les familles guinéennes qui engagent leurs terrains dans notre projet.
pour nos bailleurs, seule une certification carbone leurgarantira:
que les reboisements ont véritablement été mis en œuvre (réel)
que les reboisements n’auraient pas eu lieu sans le projet (additionnel)
qu’une croissance réelle de la biomasse peut être mesurée par rapport à une «baseline» (mesure initiale) en tenant compte des incertitudes et des risques de «leakage» (p.ex. si le projet induit des déforestations à d’autres endroits) (mesurable)
qu’un auditeur externe d’une organisation accréditée à audité le projet (vérifiable)
que le carbone séquestré sera conservé 100 ans (permanent)
Que le carbone séquestré n’est comptabilisé qu’une seule fois (unique)
L’accord avec la société qui nous accompagnera dans le processus de certification aura une durée de 10 ans au minium.
Comment faire pour garantir la pérennité de nos partenariats?
Il faut de la stabilité pour œuvrer dans la continuité. Or l’expérience montre que les associations sont en général plus fragiles que d’autres structures, telles que les fondations dont les statuts et la gouvernance sont plus stables. C’est pourquoile comité a proposé hier à l’assemblée générale extraordinaire du 12 décembre 2022 de transformer arboRise en une fondation d’utilité publique. Cela implique la dissolution de l’association et le transfert de ses actifs dans une Fondation arboRise, avec des objectifs statutaires identiques à ceux de l’association.
Selon toute probabilité arboRise sera amenée à gérer des montants importants, il est donc nécessaire de garantir que ces ressources sont utilisées à bon escient. L’autorité fédérale de surveillance des fondation fournira cette sécurité en vérifiant que les fonds sont utilisés selon les buts statutaires. Un tel contrôle n’est pas obligatoire pour une association.
Enfin, une fondation est un gage de sérieux qui facilitera la levée de fonds.
Le vote formel nécessaire pour la dissolution de l’association et sa transformation en fondation a été soumis hier soir à l’Assemblée Générale qui a approuvé la proposition du comité à l’unanimité des 15 membres présents. Le comité a été mandaté pour mettre en œuvre cette transformation, prévue pour début 2023.
Nos vifs remerciements à tous.te.s les membres pour la confiance que vous nous avez accordée et pour votre fidèle soutient pendant ces 27 mois de vie associative. Ensemble nous avons obtenus de robustes résultats. Et ce n’est qu’un début!
Comme il est extrêmement fastidieux de visiter chacun des 650 hectares restaurés par arboRise pour évaluer la santé des nouvelles forêts, nous avons cherché à mesurer à distance la croissance des arbres. Mais comment faire ? « NDVI sentinel 2 » est la réponse!
Le satellite Sentinel II de l’Union Européenne prend tous les 5 jours une photographie infrarouge du sol terrestre avec une résolution de 10m (1 pixel: 10m x 10m = 100m2). Les données fournissent de nombreuses indications sur une région, telles que l’humidité/aridité, la présence de feux, et également la nature de la végétation. Avantage non négligeable: les données sont disponibles gratuitement (voir sur le Sentinel Playground).
La valeur qui nous intéresse est le «NDVI» (Normalized Difference Vegetation Index) qui correspond au taux de couverture végétale au sol, un bon indice de la quantité de biomasse, donc un indice de la quantité d’arbres (les forêts apparaissent clairement sur les cartes avec une nuance de vert plus foncée).
On extrait pour chaque terrain reboisé, la valeur NDVI (= la nuance de vert) de chaque pixel et on en calcule la valeur médiane, la biomasse du terrain:
Pour chaque terrain reboisé, on calcule ensuite la valeur NDVI médiane du «background», une superficie de 2km de côté autour du terrain (en soustrayant le NDVI des terrains présents dans le background)
Sur la base de l’indice de nébulosité de Sentinell II on élimine ensuite toutes les valeurs avec une couverture nuageuse probable supérieure à 90% (les taches violettes sur l’image ci-dessous):
On obtient ainsi pour chaque jour de données disponible (75 par année) et pour chaque terrain:
Le NDVI médian du terrain
La nébulosité à la verticale du terrain pour ce jour
Le NDVI médian du background
La nébulosité à la verticale du background pour ce jour
…44815 lignes pour la période du 1er janvier 2021 au 22 novembre 2022…
Le graphique ci-dessous représente les valeurs NDVI de 2021 et 2022 sur une seule année. Les valeurs des jours où la nébulosité médiane du background sur un ou plusieurs terrains était supérieure à 90% ont été supprimées:
On remarque que le NDVI en 2022 est inférieur au NDVI 2021 (lignes jaunes et vertes en dessous des lignes rouges et bleues). A ce stade trois hypothèses sont possibles:
Il s’agit peut-être d’un changement de calibrage du satellite ou de la mesure (mais c’est peu probable) et ce changement devrait alors s’appliquer uniformément à toutes les mesures 2022, or le NDVI du Background baisse significativement plus (-0,19) que le NDVI des Polygones (-0,16)
L’année 2022 a peut-être été plus aride que 2021, mais ce n’est pas confirmé par la population qui affirme au contraire que 2022 a été plus pluvieuse
Il y a eu plus de feux et de déforestation en 2022…
Il faudra chercher à comprendre la raison de ce changement. Pour l’instant les comparaisons annuelles devront donc être interprétées avec précaution.
Par contre on observe très clairement l’effet de la saison des pluies:
Un accroissement progressif de la biomasse de février à août
Une nébulosité importante entre juin et octobre (moins de données pour cette période à cause des nuages)
Excellente nouvelle: En 2021 les polygones (les terrains arboRise) ont un NDVI moyen inférieur de 5,2% au background NDVI (normal, arboRise reboise des terrains dénudés), mais en 2022 le NDVI des polygones est supérieur de 3% au NDVI du background ! Et on constate une croissance positive de la différence entre la biomasse des terrains et la biomasse du background, ce qui veut dire que la biomasse sur les terrains arboRise croît plus rapidement qu’aux alentours:
Pour les terrains reboisés en 2021 on dispose de deux années de données et il est possible de les comparer: NDVI sentinel 2
La visualisation sur ce graphique permet d’identifier les «bons terrains» (en haut à droite) des «mauvais terrains» (en bas à gauche):
On constate que la majorité des terrains se situe dans la partie supérieure droite du graphique, une excellente nouvelle !
Mais quelle est l’adéquation de cette analyse satellitaire avec la réalité? Nous sommes allé voir sur place ce qu’il en est pour les terrains ID03 et ID09.
Pour le « mauvais » terrain n°3 on observe un sol appauvri suite à plusieurs années de cultures. Situé entre deux collines il s’agit probablement d’une zone de transhumance du bétail vers un point d’eau (bouses visibles). Le piétinement rend difficile la croissance de la végétation. On voit cependant de petits arbustes de 1,5m et 4 vestiges d’arbres totalement secs. Aucun signe de feu. Cette faible biomasse sur le terrain valide la mesure satellitaire du NDVI
En ce qui concerne le terrain n°9 il est impossible d’y pénétrer sans machette tellement la végétation est dense, en particulier les herbacées hautes de 3m. On voit plusieurs arbustes d’environ 2m et 3-4 arbres de 8m. A l’évidence ce terrain n’a été ni pâturé ni brûlé. Cette biomasse plus importante sur le terrain valide la mesure satellitaire du NDVI.
En conclusion les observations sur le terrain concordent avec les mesures de la biomasse par satellite. Il sera bien sûr nécessaire de confirmer cette corrélation à l’aide d’autres exemples.
Grâce à ces indices fournis par le Satellite Sentinel II nous pourrons ainsi cibler nos visites sur les terrains en forte croissance, pour en tirer des enseignements et partager ces bonnes pratiques avec les propriétaires des terrains, dont les images satellite indiquent qu’ils sont moins boisés. Cela servira de cas d’école dans le cadre des formations des familles terrains et des Comités de Gestion Communautaire.
Nous espérons également inspirer d’autres projets de reforestation qui pourront utiliser cette même technique pour évaluer la croissance de la biomasse sur leurs parcelles et gagner en efficacité.
Un immense MERCI à Sergiy pour son expertise en analyse de données GIS et NDVI sentinel 2 ainsi que ses précieux conseils !
Quel plaisir de célébrer avec Natascha, Thaís, Tiago et Faisal la remise de leur dossier « When Forests Meet Finance » à la direction de l’Executive MBA (IMD EMBA) de l’Institut for Management Development à Lausanne! Tou.te.s les quatre suivent cette formation en Management très exigeante et se sont passionnés ces derniers mois pour les activités d’arboRise.
Karl Schmedders, Professeur de Finance à l’IMD, s’est intéressé à la situation d’arboRise, passionnante du point de vue économique. En effet, comment rendre profitable une ONG active dans la reforestation ? Quels sont les enjeux sur les marchés du carbone ? Comment concilier les intérêts des investisseurs et ceux des familles guinéennes qui mettent à disposition leurs terrains pour la reforestation ?
Convaincu du potentiel pédagogique de ce cas d’étude, Karl a proposé à nos quatre étudiant.e.s d’en faire le sujet de leur Projet de Consulting Stratégique. Il s’agit d’une analyse approfondie du contexte d’un client – arboRise – pour lui recommander une ou plusieurs options stratégiques à même d’assurer son succès futur.
Les échange avec Natascha, Thaís, Tiago et Faisal ont été passionnants. Aucun.e ne connaissait la thématique de la reforestation, ni les règles des marchés du carbone et encore moins la situation des cultivateurs guinéens. Du point de vue d’arboRise, leurs questions et leurs suggestions ont également contribué à progresser dans notre maîtrise du sujet.
Au final leurs recommandations concordent avec notre intention de financer nos efforts de reforestation sur les marchés du carbone, soit en proposant des crédits carbone directement à des entreprises, soit en passant par un revendeur. Nous sommes également d’accord sur le fait que ces revenus devront principalement profiter aux familles guinéennes qui décident de reboiser certaines de leurs parcelles.
Il semble que cette analyse ait même le potentiel de devenir un véritable cas d’étude, enseigné à l’IMD.
Merci à Natascha, Thaís, Tiago et Faisal pour leur grand engagement et nos échanges conviviaux (et bonne chance pour leur IMD EMBA!) et merci à Karl Schmedders et à l’IMD pour cette belle opportunité de rendre visible les défis d’arboRise !
Résultats finaux de l’expérimentation sur le terrain
Pour rappel (voir publications du 15 août et du 15 septembre), notre expérience scientifique, financée par le Research Challenge de ETH for Development, visait à mesurer l’impact de l’enrobage des graines sur le taux de germination. Quelles sont nos conclusions?
Sur les 40 espèces forestières sélectionnées, les graines de 26 espèces ont pu être récoltées. Les 14 espèces restantes n’ont pu être identifiées à temps. Un premier comptage des pousses a eu lieu à la mi-juillet. Il été suivi d’un deuxième comptage de vérification à la mi-août. Ces comptages ont été rendus difficiles par l’abondance des adventices présentes sur le terrain. Ceci explique certaines incohérences, indiquées en rouge dans le tableau ci-dessous:
Sur les 26 espèces de l’expérimentation 17 (65%) avaient déjà germé deux mois, respectivement trois mois, après le semi. La corrélation entre le taux de germination maximal par espèce obtenu dans l’expérimentation et le taux de germination théorique selon les sources scientifiques est de 68%. En moyenne le taux de germination maximal par espèce dans l’expérimentation atteint 54%, alors que leur taux de germination théorique est de 69%.
Avant d’analyser l’impact des seedballs nous avons voulu comprendre pourquoi huit espèces ont un taux de germination au moins 30% inférieur au taux théorique. Quelles pourraient en être les raisons ?
Parkia biglobosa (68% vs 99%) : la dormance physique de ses graines est importante et il est possible que notre prétraitement n’ait pas suffit à lever cette dormance ou que la germination soit simplement plus lente pour cette espèce.
Carapa procera (35% vs. 80%) : les graines de cette espèce sont récalcitrantes. Il est probable que certaines ont séché avant le semi et ainsi perdu leur pouvoir germinatif.
Syzygium guinéense spp (0% vs. 80%) : Les graines, également récalcitrantes, doivent être semées immédiatement après la cueillette des fruits selon Prota4U, car elles peuvent se gâter dans les 24 heures suivant leur stockage. Dans ce cas aussi, il est possible que les graines aient trop attendu avant d’être semées.
Prosopis africana (0% vs. 70%) : « Les résultats montrent une forte production de semences dont la majeure partie est soit attaquée soit pourrie. Malgré, l’existence d’une dormance tégumentaire, les graines de Prosopis africana ont la possibilité de germer in situ en l’absence de feu et du bétail mais avec un temps de latence assez long »[1]. Pour éviter le pourrissement des graines sous l’arbre semencier, il aurait peut-être fallu récolter sur bâche.
Pterocarpus erinaceus (0% vs. 50%) : la dormance physiologique est faible et il est surprenant que le traitement n’ait pas suffit à la lever, d’autant plus que la germination devrait commencer 6-10 jours après le semis selon Prota4U. Peut-être que la qualité des graines était mauvaise ?
Tectona grandis (0% vs 30%) : Selon Prota4U : « La “graine” de teck est en réalité un fruit qui peut contenir jusqu’à quatre vraies graines. […] Généralement, il y a une à deux graines viables par fruit, mais parfois les fruits sont stériles. La germination d’un même lot de graines peut débuter après une dizaine de jours pour se terminer après plusieurs années ; l’optimum de la germination est vers 35–45 jours. La dormance est difficile à lever et aucune technique vraiment fiable n’a été mise au point. […] Pour favoriser la germination, les graines ne doivent pas être totalement enfouies et ne doivent pas recevoir d’ombrage. » Il est possible que les graines aient été semées trop profondément dans les poquets et que l’enrobage ait nuit à la germination.
Vitex doniana (0% vs. 34%) : selon Prota4U les fruits non traités mettent parfois très longtemps à germer et il est possible que le feu accélère la germination. En effet la dormance physiologique est importante et l’intensité de traitement que nous avons appliqué n’a probablement pas suffi.
Terminalia Glaucescens (0% vs. 30%) : il est possible que les graines de cette espèce soient récalcitrantes. De plus sa dormance physiologique est importante.
Cette brève analyse permet deux conclusions :
Le processus de fabrication des seedballs, qui requiert une période de stockage des graines, a un impact négatif sur le taux de germination des espèces récalcitrantes: sur les 6 espèces récalcitrantes parmi les 26, 3 espèces (50%) ont un taux de germination significativement inférieur à la normale, dans notre expérience.
En revanche la dormance n’a que peu d’influence sur le taux de germination lorsque l’on utilise la méthode des seedballs: sur les 12 espèces qui requièrent un traitement intense pour lever la dormance, 7 espèces ont germé normalement. Sur les 14 espèces qui ne requièrent qu’un traitement modéré pour lever la dormance, 3 espèces ont mal germé.
Contrairement à l’hypothèse, selon laquelle les espèces anémochores, barochores et autochores seraient mieux adaptées au semi-direct et à la protection par enrobage, les résultats ne montrent aucune relation significative entre le type de propagation des graines et la germination en semis direct :
6 sur 8 espèces anémochores ont germé (75%)
10 sur 15 espèces zoochores ont germé (66%)
1 sur 3 espèces barochores a germé (33%)
En ce qui concerne les traitements appliqués, l’absence de traitement (groupe C) et le traitement T1 (trempage) produisent les meilleurs résultats en moyenne, pour les deux comptages.
Pour huit espèces parmi les 17 qui ont germé, l’absence de traitement a produit les meilleurs résultats dans les deux comptages. Pour six autres espèces l’absence de traitement s’est avérée supérieure dans un des deux comptages. Seules 3 espèces ont préféré les traitements, mais dans 2 cas il s’agit du trempage. Une unique espèce, Lophira lanceolata, profite de l’enrobage, dans un des deux comptages.
Il nous semble donc possible de conclure que, dans les conditions climatiques et écosystémiques de Linko, pour les espèces ci-dessus à l’exception de Lophira lanceolata, Vitellaria paradoxa et Afzelia africana, l’absence de traitement conduit à un meilleur taux de germination. Contrairement à notre hypothèse principale, l’enrobage des graines (méthode des boulettes de graines, ou « seedballs ») a un impact moindre ou même contre-productif sur le taux de germination. L’enfouissement des graines nues, sans traitement, dans des poquets, semble suffire à leur protection contre les oiseaux, les rongeurs et les parasites.
C’est un enseignement capital pour le projet arboRise : renoncer à l’enrobage des graines simplifiera de manière significative le processus de plantation. De plus, les ressources allouées à l’enrobage pourront être utilisées pour doubler la quantité de graines récoltées et ainsi atteindre une densité de 10’000 graines par hectare, soit 1 graine par m2.
Le taux de survie sur la parcelle d’expérimentation sera mesuré une année après l’ensemencement, en mai 2023. Par la suite les plants qui auront survécu sur le périmètre d’expérimentation pourront servir pour prélever des boutures, utiles à l’enrichissement des terrains reboisés par arboRise.
[1] Niang Diop F., Sambou B., Lykke A. M. : Contraintes de régénération naturelle de Prosopis africana : facteurs affectant la germination des graines, International Journal of Biological and Chemical Sciences, 2010, p. 1693-1705. file:///C:/Users/phili/Downloads/65578-Article%20Text-130554-1-10-20110415%20(1).pdf
Planter des arbres en semi direct en Suisse, est-ce possible ? C’est ce que nous avons voulu découvrir dans le cadre de l’opération « tout est possible » que nous avions initiée en décembre 2021. Souvenez-vous: nous cherchions, comme en Guinée, plusieurs « familles-terrain » intéressées à mettre une parcelle à disposition pour un reboisement, et plusieurs « familles-graines » prêtes à récolter des semences forestières pour les essaimer sur ces parcelles.
Après la constitution des groupes et de nombreux échanges tout au long de l’année, pour étudier les terrains mis à disposition, tenir compte des attentes de leurs propriétaires, et établir une marche-à-suivre pour la récolte de graines, les récoltes ont pu commencer au mois de septembre. Chaque « famille-graines » s’est chargée de rassembler les graines des espèces d’arbres choisies pour un terrain précis.
Et nous nous sommes retrouvé tous ensemble ce samedi 29 octobre pour essaimer toutes les graines sur le terrain d’Herbolaria à La Rippe !
Marquer l’espace reboisé a été notre première étape, pour éviter que les jeunes plants ne soient coupés par inadvertance lors des travaux agricoles. Nous avons visualisé la limite extérieure de la surface reboisée avec une barrière légère sur 80 mètres. L’objectif visé était la constitution d’une haie forestière protectrice d’environ un mètre de large sur la partie Nord du terrain.
Ensuite, l’ensemencement proprement dit a pu commencer: chacun.e s’est muni d’une ou de plusieurs espèces de graines et d’un petit grattoir. En effet, pour éviter la prédation par les oiseaux, chaque graine a été semée dans un petit poquet (trou) puis recouverte de terre. Heureusement que la terre avait été fraichement labourée, cela a grandement facilité l’essaimage ! Nous avions environ 600 noisetiers de Byzance, 300 graines de houx, 200 semences de sureau, 150 châtaignes, 50 noix, 400 glands, 200 samares d’érable, et un mélange de 400 noyaux de pêcher et d’abricotier. Donc environ 2300 graines à répartir sur 4 lignes parallèles sur les 80 métres de longueur de la bordure Nord du terrain. Un sacré travail! Heureusement, le temps était très agréable et l’ambiance conviviale.
C’est avec satisfaction que nous avons repris des forces autour d’une succulente soupe à la courge!
Merci à Odile, Anne, Garance, Chantal et Philippe pour votre belle énergie et votre endurance lors de cette journée mémorable. Rendez-vous au printemps 2023 pour admirer les premières pousses et mesurer l’impact du semi direct !
ArboRise obtient la 3ème place au Prix Diaspora de la Fedevaco !
Le prix vaudois Diaspora et Développement est une initiative de la Fédération vaudoise de coopération qui a pour objectif de valoriser l’implication des diasporas du canton dans le développement de leurs pays d’origine. Grâce à ce prix qui a lieu tous les deux ans, la Fedevaco entend accroitre l’impact des diasporas dans leurs pays d’origine comme d’accueil et renforcer leur positionnement en tant qu’acteurs de la coopération et du développement durable.
Puisque notre vice-présidente, Mariame Camara, est originaire de Guinée, il nous a semblé pertinent qu’arboRise soumette sa candidature, qui a été retenue par la Fedevaco (voir la publication du 20 octobre 2021). Nous avons ainsi pu suivre les sept modules de formation de grande qualité et développer en parallèle notre projet de développement, dont voici le résumé (le document est disponible sur demande):
En Afrique subsaharienne la plupart des familles urbaines utilisent du charbon pour cuisiner. Les nuisances sont importantes pour elles et les coûts récurrents élevés. Au niveau global, transformer des arbres en charbon est un facteur de déforestation important et augmente le réchauffement climatique.
Comme solution de substitution nous préconisons le biogaz, qui fonctionne comme un estomac de vache : on introduit des déchets végétaux dans une cuve étanche – le biodigesteur – qui les transforme en méthane, utilisé pour cuisiner à la place du charbon. Le liquide qui reste – le digestat – est un excellent fertilisant, utile également en pisciculture. Quelques kilos de déchets par jour assurent l’autosuffisance d’une famille. Elle économise ainsi les coûts d’achat des sacs de charbon, qui représentent environ 10% de ses charges annuelles.
Notre projet vise à développer une petite unité de production de biodigesteurs domestiques à Conakry avec un technicien formé au Burkina Faso, pour vendre cet équipement aux familles de la périphérie de la ville, qui cuisinent dans une cour à ciel ouvert et ont accès à des déchets végétaux. La production d’un biodigesteur coûte CHF 125.-/pièce et sera totalement made in Guinea.
Une démonstratrice présentera les avantages de notre solution lors de réunions d’associations de femmes dans chaque quartier. Chaque ménagère intéressée pourra, après deux semaines de test, acquérir le biodigesteur avec un système de paiements échelonnés. En 18 mois elle sera propriétaire et économisera ensuite les coûts d’achat du charbon.
En plus de recycler les déchets végétaux (chutes de maraîchage), notre technique fournira également de l’engrais bio aux agriculteurs de la périphérie de Conakry, tout en réduisant la déforestation.
Nous commençons cette année par une phase pilote pour vérifier la faisabilité et sentir la réaction du marché. Nous avons besoin de CHF 6’000.- pour préfinancer les 50 premiers biodigesteurs.
Cette distinction nous honore et nous remercions chaleureusement la Fedevaco pour l’organisation de ce Prix. Outre les enseignements tirés du cursus de formation il nous a également permis de rencontrer de belles personnes. La passion et l’engagement de l’ensemble des 14 porteurs et porteuses de projet doivent être salués ici. Nos félicitations également aux 3 autres lauréats !
Organiser la récolte des graines forestières nécessite de connaître les périodes de fructification de chaque espèce. Nous recommandons d’établir un calendrier de récolte selon le modèle du tableau ci-dessous, résultat de nos enquêtes sur le terrain, combiné avec les ressources en ligne [1]. Les périodes de récolte idéales figurent en vert (orange : début possible et fin de récolte). Elles correspondent aux conditions écosystémiques et climatiques de la sous-préfecture de Linko. Cet aperçu des périodes de maturité nous a permis de constituer trois groupes d’espèces, pour augmenter l’efficacité de la récolte.
Pour optimiser le taux de germination avec la méthode des seedballs en semi-direct, nous avons ensuite analysé quatre caractéristiques de nos 40 espèces : la dormance et les prétraitements requis pour la lever [2], le mode de propagation, le poids des graines et la tolérance à la dessication.
La dormance pouvant avoir un impact sur le taux de germination de notre expérience, nous avons recensé le type de dormance [3] de chaque espèce selon la littérature scientifique [4]. Puis, pour déterminer le type de prétraitement à administrer à chaque espèce pour lever la dormance, nous avons consulté les recommandations pratiques du Centre National de Semences Forestières de Ouagadougou, qui fait autorité en la matière en Afrique de l’Ouest. On observe, dans le tableau ci-dessus, peu de correspondances entre la source scientifique et l’expérience des praticiens.
Sur le graphique ci-dessous, qui représente les 40 espèces classées par période de maturité des graines, et le niveau d’intensité des prétraitements recommandés par les praticiens, on constate (traitillés rouges) que les espèces arrivant à maturité en saison sèche (novembre-avril, sur la gauche du graphique) ont plus souvent besoin d’un prétraitement pour lever leur dormance que celles arrivant à maturité avant l’arrivée des pluies. Les 17 espèces de saison sèche ont une intensité de prétraitement de 4,8 alors qu’elle est 2,9 de pour les 23 espèces de saison humide. Cela semble logique puisqu’une germination en saison sèche engendrerait un taux de mortalité élevé pour les graines de ces espèces précoces : c’est pourquoi celles-ci disposent plus fréquemment de mécanismes de dormance.
Dans notre expérience, nous avons appliqué les prétraitements requis aux groupes-tests 1 et 3 pour mesurer l’impact de la dormance et de sa levée sur le taux de germination. Notre hypothèse était que l’enrobage pourrait inhiber la levée de la dormance (pour les espèces à dormance physique) ou la retarder (pour les espèces à dormance physiologique).
Le mode de propagation des graines, dans le tableau ci-dessous, vient confirmer notre observation que les espèces adoptent des stratégies de reproduction différentes, suivant qu’elles arrivent à maturité à la saison sèche ou à la saison des pluies : dans le groupe des 17 espèces de saison sèche 7 espèces sont anémochores et 6 espèces sont zoochores, alors que la proportion des zoochores est significativement plus élevée parmi les espèces qui arrivent à maturation à la saison humide :
Anémochores
Zoochores
Barochores
Autochores
Maturité en saison sèche
41%
35%
18%
6%
Maturité à la saison des pluies
22%
61%
9%
8%
Il semble ainsi que les espèces de saison sèche s’appuient plus volontiers sur les éléments naturels (vent, gravité) pour leur dissémination. A l’inverse les espèces de saison des pluies utilisent plutôt les animaux, peut-être parce que ceux-ci, protégés par la couverture végétale de la saison humide, parcourent de plus grandes distances à cette période de l’année. Cette propagation zoochore de la moitié des 40 espèces sélectionnées par arboRise pourrait, à terme, renforcer naturellement l’action de reforestation d’arboRise (d’autant plus que le projet arboRise vise, à long terme, à établir un corridor forestier favorable aux déplacements de la faune entre les parcs nationaux du Haut-Niger en Guinée et de la Comoé en Côte d’Ivoire).
Le nombre de graines par kilo, et donc le poids moyen par graine ne présente pas de surprise : les graines disséminées par le vent (anémochores) et autopropulsées par explosion (autochores) sont les plus légères, alors que les graines propagées par la faune (zoochores) ou la gravité (barochores) sont les plus lourdes en moyenne :
Le poids par graine a également son importance en ce qui concerne le processus de confection des boulettes de graines, puisque les graines lourdes sont plus faciles à manier.
Plus fondamentalement ces observations soulèvent plusieurs questions subsidiaires :
Quels types de graines se prêtent-ils le mieux au semi-direct ? On pourrait formuler l’hypothèse (2) que les espèces anémochores, barochores et autochores, qui se propagent naturellement par le vent, la gravité ou par explosion, sont mieux adaptées au semi-direct, que les espèces zoochores qui requièrent parfois le passage par le transit intestinal de l’animal qui les transporte.
A quel type de graines l’enrobage dans des boulettes d’argile et de charbon de bois profite le plus ? Ici on peut formuler l’hypothèse (3) que l’enrobage est nuisible aux espèces zoochores à dormance physique, qui sont destinées à être avalées et excrétées, alors que les autres espèces sont le plus souvent consommées et profiteraient plus de la protection d’une boulette.
Notre publication du 30 octobre répondra à ces questions et présentera tous les résultats finaux de l’expérience !